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Comment a-t-on démontré la rotation de la Terre ?


L’idée que la Terre tourne sur elle-même est très ancienne. Dès l’Antiquité, Aristarque de Samos (vers 310-230 av. J.-C.) proposait déjà un système dans lequel la Terre tournait autour du Soleil. Allant contre le sens commun, cette idée ne sera pas retenue, face aux théories d’Aristote, qui imposèrent durablement l’idée d’une Terre immobile au centre de l’Univers. Il faudra attendre 1543 et Nicolas Copernic, pour que l’idée d’une Terre en mouvement ressurgisse. Dans les décennies suivantes, les travaux de Kepler et Galilée viendront à bout des thèses aristotéliciennes. Et à l’époque de la découverte de la loi de la gravitation universelle par Newton, l’idée que la Terre puisse tourner sur elle-même s’imposa finalement, bien qu'aucune preuve scientifique ne soit fournie ! Cette situation allait encore durer. En 1801, l’astronome et mathématicien Pierre Simon Laplace écrit dans sa Mécanique céleste : « Quoique la rotation de la Terre soit maintenant établie avec toute la certitude que les sciences physiques comportent, cependant une preuve directe de ce phénomène doit intéresser les géomètres et les astronomes ». Il faudra attendre encore cinquante ans pour mettre en évidence la rotation terrestre.


En 1851, le physicien Léon Foucault (1819-1868) a l'idée d'une expérience ingénieuse, visuelle, et facile à comprendre. « Ce qui m’a mis sur la voie de l’expérience du pendule est le fait que le plan de vibration d’une verge fixée dans le mandrin d’un tour reste fixe lorsqu’on met le tour en rotation. Cet effet nous parait toujours surprenant. Si le plan de vibration reste fixe, c’est qu’il n’y a aucune force qui puisse le faire tourner ». En faisant l'analogie avec le pendule, il imagina qu'un observateur terrestre devrait voir se manifester la rotation de la Terre sous la forme d'une lente rotation apparente du pendule, en sens inverse de son plan d'oscillation.


Pour que l'expérience fonctionne, le fil de suspension accroché au plafond du bâtiment, doit être très long, afin que le pendule puisse se balancer suffisamment longtemps. La règle du pendule est simple : une fois lâché, il se met à osciller sans changer de direction. Foucault réalise sa première expérience dans la cave de sa maison de la rue d’Assas, à Paris. Une boule de laiton de 5 kg est suspendue à un fil d’acier long de deux mètres. Cependant, les tumultes de la ville occasionnent des vibrations qui obligent Foucault à pratiquer son expérience de nuit, entre une heure et deux heures du matin ! Le 8 janvier 1851, après plusieurs heures de mouvement, le physicien observe que le plan d’oscillation du pendule tourne très lentement sur lui-même. Comme ce plan est invariant, il en conclut que c’est le sol, et donc la Terre qui a tourné sous le pendule. Son expérience venait de démontrer la rotation de notre planète.


Il communique son résultat à François Arago, alors directeur de l’Observatoire de Paris. Ce dernier lui propose de renouveler l’expérience devant le public, dans la grande salle du méridien de l’Observatoire, avec un pendule long de onze mètres. Le 3 février, Foucault annonce sa découverte à l’Académie des sciences. Le 25 mars, à la demande de Louis Napoléon Bonaparte, l’expérience est réalisée sous la coupole du Panthéon, devant un public toujours plus nombreux.

Le Pendule de Foucault au Panthéon (Paris).

L’EXPÉRIENCE PERMANENTE DU PENDULE DE FOUCAULT,

SOUS LA COUPOLE DU PANTHÉON A PARIS

Pour l’expérience du Panthéon, on utilisa cette fois une boule métallique de 38 cm de diamètre, pesant 28 kg. Elle était suspendue à un câble d’acier long de 67 mètres. Pour les besoins de la démonstration, on plaça sous le pendule un cercle en bois de 6 mètres de diamètre, gradué en degrés et quarts de degrés, centré sur la verticale du point de suspension. A chaque oscillation, le style fixé sur la boule venait inscrire sa trace dans deux petits bancs de sable. Après un aller et retour de 16 secondes, on put constater que la pointe revint mordre le sable à 2,5 millimètres à gauche de son point de départ. Le même effet se reproduisant à chaque oscillation, la brèche dans le sable s’agrandit peu à peu, matérialisant ainsi la rotation de la Terre.


Le calcul montre qu’à la latitude de Paris et en l’absence de frottement, le pendule met exactement 31 heures 52 minutes pour faire un tour complet. En effet, le pendule fera un tour complet sur lui-même en 23h56 minutes s’il est situé exactement sur l’un des deux pôles de la Terre. Plus on descend en latitude, plus la rotation du pendule est lente, jusqu'à être nulle sur l'équateur.



Spectaculaire et pédagogique, l’expérience du pendule de Foucault connu un grand succès. Rapidement, de nombreuses villes françaises refirent la démonstration. Ce fut le cas à Reims, où l’expérience se déroula dans la cathédrale le 8 mai 1851.


Encore aujourd’hui, de nombreuses villes proposent d’admirer le pendule de Foucault : c’est le cas au musée du Temps de Besançon, mais également au Pavillon des sciences de Montbéliard. A Paris, l’expérience du Panthéon peut toujours être admirée, ainsi qu’au Musée des Arts et Métiers.


Après le pendule, et afin de convaincre les derniers sceptiques, Léon Foucault chercha à imaginer un objet moins encombrant qui resterait immobile dans l'espace absolu. Il créa ainsi le gyroscope, matériel encore utilisé de nos jours au quotidien dans l'aviation par exemple, mais également dans les sous-marins et les satellites.

 

Un article de Sébastien Beaucourt, médiateur scientifique au Planétarium de Reims. Suivez-le sur YouTube : Lecielenquestions.fr

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