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L’Astronome de Johannes Vermeer


L'Astronome de Vermeer

Nous sommes dans un siècle d’effervescence intellectuelle et scientifique. En 1610, Galilée réalise ses premières observations à l’aide d’une lunette astronomique. Ses découvertes vont progressivement confirmer l’héliocentrisme. Un peu partout en Europe, des Académies des sciences se constituent. Preuve de cet engouement pour les sciences, et en particulier pour l’astronomie, en 1666, Louis XIV fait construire l’Observatoire de Paris.


Au milieu de ce XVIIe siècle, la République des Provinces-Unies (futur Pays-Bas) gagne son indépendance vis-à-vis de l’Espagne et devient une grande puissance maritime. Descartes s’y installe pour écrire son Discours de la méthode.


La ville de Delft, entre la Haye et Rotterdam est un des fleurons de cette réussite économique. C’est la ville natale de Johannes Vermeer (1632-1675). Il y vivra toute sa vie. Comme ses contemporains, il peint des moments de la vie quotidienne en format réduit : La laitière, La jeune fille à la perle, La dentelière, … Pour les peintres, la donne a changé. Les commandes ne viennent plus des monarques ou de l’Église, mais des marchands et des artisans, qui souhaitent décorer leur intérieur et montrer leur réussite.


En 1668, pour la première fois, Vermeer représente un homme seul. Mais pas n’importe quel homme : il choisit un astronome.


Le tableau est de petites dimensions : 45 x 50 cm. Qu’y voyons-nous ? Le savant est entièrement absorbé à sa tâche. Il semble mesurer de ses doigts l’écartement entre les constellations visibles sur le globe qui lui fait face. Sur son bureau, éclairé par une lumière douce et latérale, il dispose d’instruments : un compas, un astrolabe et un livre ouvert. Un tapis se déploie au premier plan. Ses couleurs contrastent avec l’habit du personnage. En arrière-plan, une armoire sur laquelle on devine un planisphère céleste. En dessous, la signature du peintre. Au fond à droite, un tableau que l’on ne voit qu’en partie, représente Moise sauvé des eaux.


L’évocation de Moise n’est pas anodine. Tout comme l’astronomie permet de guider les marins, Moise peut être vu comme un navigateur guidant son peuple à travers la mer Rouge.

Le tableau a fait l’objet de nombreuses études au cours des derniers siècles, ce qui a permis d’identifier les nombreux objets présentés.


Le regard du spectateur est attiré par le globe céleste du fabricant Jodocus Hondius, sur lequel on reconnait les constellations suivantes : la Grande Ourse, la Petite Ourse, le Dragon, Hercule, le Bouvier, la Balance et la Vierge.


Le livre devant le personnage est la seconde édition du Manuel de Géographie et d’Astronomie d’Adriaen Metius de 1621, ouvert aux deux premières pages du livre III Observation des étoiles. La page de droite est couverte de texte, celle de gauche illustre l’utilisation de l’astrolabe présent à la base du globe devant le personnage. Ce livre était destiné aussi bien aux amateurs qu’aux professionnels et proposait un enseignement de l’utilisation des instruments liés à l’astronomie et à la géographie.


Cela nous amène à un autre tableau de Vermeer, peint à la même époque : le Géographe.

Le Geographe de Vermeer

Ces deux œuvres présentent des similitudes intéressantes. Tout d’abord, ils constituent ensemble les deux seules représentations d’une figure masculine isolée de l’artiste. On notera également que les compositions sont les mêmes (fenêtre, tapis, armoire, cadre au mur et le globe), ainsi que le personnage représenté. L’astronome et le géographe sont ainsi une seule et même personne. A l’époque, ces deux sciences sont complémentaires, à tel point que l’on nomme cosmographe celui qui les pratique.


Il est étonnant de noter que, parmi les instruments représentés, la lunette astronomique n’y figure pas, alors qu’elle était déjà largement répandue en Europe, et qu’il s’agit surtout, d’une invention hollandaise !


Dans ses tableaux, Vermeer incorpore souvent une lourde pièce de tissu (nappe, rideau, tapis), peut-être en hommage à son père tisserand. Bien souvent, cette étoffe menace de tomber, ou nous cache une partie de la scène. Une façon de nous montrer que rien n’est tout à fait accessible. Une façon de préserver le mystère, tout comme l’est l’identité de cet astronome.

 

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